Éric Brouard

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ARCHIVES OUBLIÉES

 

Cahier des souvenirs enfouis dans ma mémoire,

Archives oubliées dans le fond d’un tiroir, 

De leurs textes vivants sortis à la lumière,

J’extrais les pages d’un retour en arrière.

 

Archives dormantes arrachées au sommeil

Font vibrer en moi la sonnerie du réveil. 

J’y retrouve les mots dont j’ai pu me nourrir

Et tous ces ressentis que j’ai voulu écrire.

 

Étrange passé, lointain, si proche à la fois,

Ebauches et brouillons, des mots froissés parfois, 

Tous ils reprennent vie, m’invitent à l’évasion, 

Se rient des certitudes et changent ma vision.

   

Du silence des mots ma plume manifeste 

Entraîne mon poignet à dessiner un texte.  

La boite à souvenirs s’est ouverte, béante,

Et m’offre ses idées et ses mots, obligeante. 

 

Elle me pousse à écrire l’envie de revenir

Aux émotions anciennes que je voulais décrire

Pour faire vivre à nouveau les mots cachés en moi,

Que tu m’as inspirés un jour, ô toi, toi, toi.

 

 

 

MÉDITATION

 

Les yeux fixés au ciel j’en cherche le mystère ;

Un autre paradis, une nouvelle terre.

S’y croisent tant de planètes dans l’espace infini,

Chapelets de lumière que l’amour réunit.

Tout brille de pleins feux : un Eden silencieux.

J’attends une rencontre sous la voûte des cieux.                                   

L’esprit de ma pensée gagnera-t-il ce soir

Dans l’espérance de voir accrocher au miroir

Tous ces purs diamants blancs faisant un signe d’amour,

Ces lanternes de couleurs d’une nuit en plein jour ?

 

Un léger vent se lève soufflant vers les étoiles

Un ciel multicolore a sublimé la toile

Révélant à mes yeux un moment merveilleux.

Une pensée sidérale a exaucé mon vœu.

Je sais d’ores et déjà que je ne suis plus seul.

En ouvrant mon esprit une perle sous mon œil

A glissé sur ma joue en inondant mon cœur

D’un univers vivant m’apportant du bonheur.

Moment surnaturel j’ai déployé mes ailes 

Pour annoncer cette joie que je veux éternelle.

 

 

Louise GUERSAN

 

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LA COMPLAINTE DU PAUVRE POÈTE

 

Je ne suis pas Ronsard, le prince des poètes,

Enivré de la vie, soupirant malheureux,

Libertin, passionné, et toujours amoureux.

Jonglant avec les mots et qui contait fleurette,

 

Le cœur une fois en cendres

Pour une belle Cassandre

Le cœur une fois transi, 

Pour une jolie Marie.

 

Je ne suis pas Marot, poète emprisonné

En un temps où l’Eglise obligeait au carême,

Assénant sans pitié censure et anathème.

Poète dit gaulois qui du sexe opposé

 

Détailla les blasons

Et appas à foison, 

Tantôt le beau tétin,

Tantôt le popotin. 

 

Je ne suis Baudelaire dont la mélancolie

Profonde et solitaire a attristé mon âme.

La sienne cependant était en proie aux flammes ;

Les flammes de l’amour et celles de la folie.

 

Pauvre poète maudit

Qui se crut avili,

Etranger en ce monde

Où le bonheur n’abonde.

 

Je ne suis pas Villon, qui fut des mots bretteur, 

Croquant à belles dents dans le fruit défendu,          

Disparu un beau jour mais ne fut point pendu,

Tantôt un peu fripon, tantôt un peu voleur,

 

Fréquentant en guenilles,

Dans les bouges, des filles,

Querellant, se battant,  

Et puis se désolant.

 

Je ne suis pas Hugo qui sur les siècles bondit,   

La conscience aiguisée sur les malheurs des autres,

Luttant pour la justice comme un patent apôtre, 

Cœur serré, désolé, mais d’espoir enhardi.

 

O poète admirable

A l’âme secourable, 

Qui pour les indigents

Fit plus que dirigeants. 

 

Je suis petit oiseau sur une branche cassée  

Qui soupire à la vie, qui soupire à l’amour,

Chantant de mauvais vers tout comme un troubadour, 

Le cœur tout déchiré et son âme blessée. 

 

 

 

Alice-Pragnia GUYON

Sarah JAMAÏ

 

 

Nuage blanc

 

Si chaque nuage

S’habille de costume blanc

Il existe un ciel

Où la fête patiemment attend

 

Il faut s’assoir sur le bord du temps

Parmi les étoiles et les rosées

Pour dire au ciel

« Je suis un poème ailé »

 

Je veux voler avec toi

Comme vole le vent avec les mots aimés

Danser au rythme d’une étreinte unique

Et mourir de recommencer

 

Quand tout autour de nous sera dernier

Et que nulle envie de rage ne renaît

Les yeux grand ouverts, les yeux clos

Je te rejoindrai même dans l’absence

 

Au-dessus de sept lits de nuages

Je déposerai l’offrande : mon corps

A la nuit qui déshabille les secrets

Et je verserai le silence prolongeant le songe

 

 

 

Rouge

 

Le cœur des choses

Les pensées que l'on dépose

Sur les ailes du vent

Rouge comme le sang qui teint les roses

Rouge comme le temps

Le torrent de mon silence entre en transe 

Et moi je me languis de la nuit qui encore balance ses cheveux noirs sur le dos

Avancer au milieu des mots 

S'arrêter un instant dans un champ de prose 

Chercher l'absent

Rien ne se murmure entre ma peau et le vent 

Rien ne se suspend aux doigts sales que je tends 

Vers des feuilles tristes teintées de blanc 

Mon encre fond sur les pages 

Comme un gémissement obscur et sans rage 

Seul mon souffle semble haletant 

Sur le chemin gris où partent se cacher les rêves qu'on poursuit 

Main dans la main, sans espoir et sans ennui 

Je te regarde 

Et dans tes yeux, toujours quelque chose jaillit 

Le tambour qui soudain tremble comme la lèvre lorsqu'elle ment

Et les femmes qui en cercles vacillent et dansent lorsqu'elles rient

La terre autrefois ronde s'aplatit

Pour mieux embrasser les pieds que tu déposes

Bercer le jour avec sa voix comme l’on berce un enfant qui ne viendra pas 

Garder les mots éparpillés devant soi 

Ecraser la nuit de tout son poids 

Ma rage n’est plus tranquille comme une toile de fond 

Porter le corps comme un souvenir du jour qui s’en va 

Je lève mes roses à l'amour qu'on trahit 

Et sans gêne je te regarde et sans gêne je ris